Dernièrement, le thème de "fausses nouvelles" est devenu très à la mode. Google et Facebook
 sont par ailleurs en réaction face à ce fléau. Certains diront que les 
fausses nouvelles ont influencé les élections américaines de Novembre 
dernier...
La situation a pris une telle envergure que plusieurs 
chercheurs et éditorialistes y vont de leurs opinion et supposition 
éclairées quant à la racine du problème et la cascade d'impact en 
découlant. De l'effet papillon à l'indifférence tout un chacun a son 
opinion. Et bien en voilà un de plus...
J'aimerais toutefois 
offrir une autre perspective à la situation. Les fausses nouvelles sont 
elles-mêmes de fausses nouvelles. La désinformation était omniprésente 
dès le début de la communication organisée entre les humains. "T'aurais 
dû voir le mammouth, il avait deux fois ma hauteur et était trop large 
pour entrer dans la grotte!" La désinformation fait partie intégrante du
 discours et de l'histoire. La perception de la réalité est basée sur 
les stimuli captés par les sens et interprétés par le cerveau. Celui-ci, 
construit ensuite une scène complète indépendamment de la qualité de 
l'information. Ainsi, les éléments manquants sont extrapolés (ou 
imaginés) à partir de l'expérience et du contexte. Les souvenir sont 
donc influencés par les pensées autant que par la réalité. Une étude réalisée en 2004 a démontré qu'il est même possible d'induire des faux souvenir d'une situation précise.
Dans notre univers "individuo-social [1]",
 la valeur sociale d'un individu dépend de l'exclusivité ou de la 
primeur d'une information. L'humain est presque programmé pour exagérer 
dans sa course à l'intéressement et l'amélioration de sa valeur sociale.
 À l'ère pré-urbaine, toute histoire nouvelle ou divergente était reçu 
avec doute et scepticisme. Outre certaines classes sociales dirigeantes 
(politique, religion, médecine,etc.) l'étalement sur la place publique 
d'une nouvelle idée demandait nécessairement une validation par 
plusieurs tiers idéalement indépendants. Tout le monde connaissait le 
sens profond du dicton : "À beau mentir qui vient de loin." Aujourd'hui 
plus personne ne vient de loin mais personne n'est du "coin".
Ainsi,
 la racine du problème est peut-être plus dans la difficulté à exercer 
une pensée critique face à une information que dans la diffusion de 
matériel de qualité douteuse. Le problème est en plus exacerbé par la 
compréhension de plus en plus approfondie de la pensée, des mécanismes 
de décision et des mouvements sociaux.
 Les communicateurs et influents sont en mesure d'exploiter les 
faiblesses de l'humain pour mieux camoufler la désinformation et 
surcharger l'esprit d'informations tout en pressant l'action rapide.
L'information
 qui nous est fournie est rarement complète et exacte. Bertrand Russell 
disait: "Lorsqu'un homme vous affirme qu'il connait la pure vérité à 
propos de quoique ce soit, vous pouvez assurément déduire que cet homme 
est dans l'erreur... Il est par ailleurs curieux d'observer que la 
certitude subjective est inversement proportionnelle à la certitude 
objective." (Traduction libre Skeptical Essays)
 Il est de notre responsabilité à tous de douter, réfléchir et former 
une opinion sur l'information présentée. Il faut également faire cet 
exercice en toute humilité et ignorer son égo pendant celui-ci. Et 
tout cela, en quelques secondes si on ne veut pas manquer la nouvelle 
suivante.
[1] Individuo-social n'est pas un vrai mot mais il 
illustre le paradoxe de notre société. Les humains sont de plus en plus 
interconnectés à travers différentes plateformes d'échange mais ces 
connexions ne créent pas nécessairement de liens émotifs ou d'engagement.
 Ils servent plutôt de vitrine où chacun expose une image idéalisée de 
sa personne et ou de sa vie. Au-delà des communications, l'utilisation des médias sociaux est de nature très personnelle: j'exhibe ma personne, mes 
connaissances, mes expérience, etc. et/ou je regarde, contemple, espionne 
la vie des autres dans l'unique but de satisfaire mon égo. 
 
Aucun commentaire:
Publier un commentaire